Réaction à l’annonce du gouvernement sur les AEP
Nous avons écouté avec attention l’annonce du gouvernement cet après-midi sur les attestations d’études professionnelles (AEP), incluant pour le métier de charpentier-menuisier.
Soyons clairs : nous sommes en faveur d’un principe de soutien financier pour les étudiants et étudiantes à la formation professionnelle.
Toutefois, cette mesure doit s’accompagner d’une vision d’ensemble et long terme pour revaloriser la formation professionnelle. Depuis plusieurs années, les bassins ouvrent à plein dans l’industrie de la construction. Alors que cela devait être une exception, c’est maintenant devenu la voie d’accès principale à notre industrie. Par exemple, pour notre métier, le bassin pour la région de Montréal a ouvert 3 fois depuis le début de l’année et 8 fois pour la région de l’Outaouais. En 2022, c’est 1460 nouveaux charpentiers-menuisiers diplômés qui sont entrés sur les chantiers contre près de 5000 non-diplômés. C’est presque 3.5 fois plus!
Suite à l’annonce, nous n’avons aucune indication de la part du gouvernement que ces ouvertures de bassins seront limitées à la suite de l’introduction des AEP. Nous n’avons de plus aucune garantie quant au caractère temporaire des AEP. Enfin, nous n’avons toujours pas plus de détails sur les éléments du DEP qui seront retirés pour accommoder une formation accélérée.
Ce qui est proposé est un faux remède pour une problématique qui date depuis de nombreuses années. On continue de niveler vers le bas et de mettre en place des mesures à courte vue au lieu de favoriser des solutions à long terme pour l’industrie de la construction.
DÉVALORISATION DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE
La formation initiale constitue le socle du développement des compétences et elle est garante de rétention de la main-d’œuvre. Pour le métier de charpentier-menuisier, c’est 40% des non-diplômés qui quittent après 5 ans, contre 22% pour les diplômés. Chez les femmes, ce pourcentage est encore plus élevé : on parle de 61% d’abandon chez les non-diplômées contre 45% chez les diplômées.
Malheureusement, les taux de diplomation sont en déclin depuis 2015 et aucun rattrapage à la hauteur des besoins de l’industrie, pourtant en forte croissance depuis 2017, n’a été réalisé. Au contraire, la formation a été charcutée de tous bords : contournement de la formation initiale par les ouvertures de bassin, accélération du passage au statut de compagnon, tâches résiduaires effectuées par les apprentis, modification du ratio apprenti/compagnon…
Les AEP proposés par le gouvernement seront un passage accéléré vers les chantiers qui aura certainement un impact négatif à long terme sur notre industrie.
DES SOLUTIONS DURABLES EXISTENT
Un investissement substantiel dans le programme de DEP – à travers un rehaussement significatif du financement des centres de formation professionnelle (CFP), d’incitatifs financiers pour les étudiant.es, de formules d’alternances travail-étude (ATE) adaptées à l’industrie – constituerait une solution solide et gagnante pour tous!
De plus, il faut favoriser l’accès à la formation pour les personnes qui entrent par bassins. En ce moment, l’obligation de formation est à 30 heures seulement et parfois, ce minimum n’est même pas respecté. L’apprentissage et le perfectionnement pour notre métier, cela doit être à la portée de tous.